Le salon des micro-entreprises ouvre ses portes aujourd’hui à Paris au Palais des Congrès. Pour Guillaume Cairou, président du Club des entrepreneurs et du groupe Didaxis, il faut que la France revoie sa manière d’envisager l’emploi, et que les Français se donnent les moyens de se détacher du salariat.

Créer son entreprise, pourquoi pas. Mais pas sans filets. (ROMUALD MEIGNEUX/SIPA) CDI : voilà un acronyme qui fait rêver la majeure partie des Français, en particulier les jeunes diplômés à la recherche d’un premier poste, et qui aspirent bien souvent à un cadre statutaire rassurant, au moins sur le papier. Pourtant, à quelques jours de la 17e édition du salon des micro-entreprises, il serait bon de rappeler un chiffre : en l’espace d’une dizaine d’années, le nombre d’entrepreneurs indépendants a augmenté de 85% en France, offrant ainsi de formidables perspectives aux travailleurs qui peuvent désormais créer eux-mêmes leur propre emploi. 

Un attachement aveugle aux modèles dépassés

À l’heure où le taux de chômage, en particulier celui des 18-25 ans, atteint chaque mois de tristes records, comment cette solution, dont la simplicité et l’évidence devraient apparaître à tous, peut-elle être ignorée par nos gouvernants et une large partie de nos élites ? Sans doute faut-il voir un attachement aveugle à deux modèles dépassés, celui du salariat et du CDI justement, qui ne sont plus adaptés au développement et à la croissance de l’économie numérisée qui prend forme sous nos yeux et d’une manière pourtant éclatante. Ce nouveau paradigme, c’est aussi celui d’une économie à la demande, où le consommateur recherche avant tout une prestation de services sur mesure et instantanée.

Or, le salariat tel que nous le connaissons jusqu’à présent, et son corollaire, le CDI, restent l’apanage d’une société industrielle où la production de masse, le plein emploi et l’absence d’une forte concurrence internationale constituaient les règles du jeu connues et admises par tous. Alors que 98% des entreprises françaises sont en réalité des très petites entreprises (TPE) ou microentreprises, qui emploient en moyenne un seul salarié, il apparait évident que ce modèle est désormais derrière nous et c’est se voiler la face que de prétendre le contraire !

Devenir « employeurs de nous-mêmes » 

D’Uber à AirBnB, en passant par TaskRabbit, plateforme innovante qui permet de sous-traiter les tâches de tous les jours, etc., l’avènement de l’économie du partage nous oriente vers une société où chacun peut devenir son propre patron et choisir de cumuler un ou plusieurs emplois, en fonction de ses capacités de travail, de ses besoins financiers et de son rapport au temps de loisir. Devenir « employeur de nous-même » et créer sa propre activité, c’est pouvoir reprendre le pouvoir sur nos vies. Il faudra aussi, et c’est heureux, substituer au droit du travail existant un « droit de l’actif » nécessairement plus flexible et plus souple, qui n’asphyxiera plus l’activité économique. Songeons avant tout à l’incroyable liberté qui peut désormais être la notre : raisonner en terme de missions ponctuelles et adaptées à une vraie demande, plutôt qu’avec des contrats permanents, où quelques rares moments d’excitation succèdent à l’ennui de la routine. Pour un « small business act » à la française Hélas, nous restons arc-boutés sur des privilèges datant de l’après-guerre, qui nous empêchent de voir le retard pris par la France en comparaison de bon nombre de ses voisins ou partenaires occidentaux.

Que l’on songe aux Etats-Unis, où plus d’un tiers des travailleurs, soit plus de 45 millions de personnes, sont indépendants ! D’ici à 2020, le nombre d’indépendants ou freelance devrait même dépasser celui des salariés (source MBO Partners). Cette réflexion profonde sur notre changement de modèle doit bien évidemment s’accompagner d’une batterie de mesures ambitieuses pour nos entreprises, allant de la création d’un statut unique de l’entreprise individuelle au vote d’un « small business act » à la française, sans oublier la nécessaire simplification de toutes les formalités administratives. Notre pays possède néanmoins tous les éléments pour réussir et éviter la précarité aux jeunes générations qui sont pour le moment près de 25% à en faire l’amère expérience. Encore faut-il accepter d’entrer pleinement dans le 21e siècle et de nous détacher des schémas et modes de pensée aujourd’hui caduques qui convenaient à la société de nos parents et de nos grands-parents.